
Rencontres de l'Agora
22 novembre 2023 - 8h30 à 14h - Maison de la Chimie
Entre liberté d’expression et exigences de sécurité, quelle régulation pour les réseaux sociaux ?
Un ministre déclarait, à propos de la régulation du net, que ce qui est interdit dans la rue doit l’être aussi en ligne. La notion d’ordre public, conçue pour réglementer l’espace public matériel doit être élargie à l’espace virtuel avec la difficulté qui s’attache à l’extraterritorialité d’internet, lorsqu’elle entre en conflit avec les pouvoirs régaliens. Parce qu’il est porteur de contenus, le web est créateur de sens, de faux-sens, de non-sens. Les mots, les images sont créatrices d’émotions, d’impulsions, d’intrusion dans la vie privée. Par leur diffusion et leur spontanéité, les réseaux sociaux sont porteurs du meilleur comme du pire.
Jamais leur responsabilité n’a autant été pointée du doigt que lors des récentes émeutes urbaines en France. L’idée de “couper” les réseaux sociaux de façon ponctuelle a même été un temps envisagée au plus haut sommet de l’Etat. Alors qu’en est-il vraiment ? Les réseaux sociaux, qui agissent comme de formidables amplificateurs, présentent de facto un risque systémique en raison de la viralité de leurs contenus. Ils ont ainsi sans nul doute contribué au déferlement de violence qu’a connu la France. Certaines de leurs fonctionnalités ont également certainement facilité la coordination et le regroupement des émeutiers comme la “snap map” qui indique en temps réel sur Snapchat les lieux où étaient postées le plus de vidéos. Mais le chapeau qu’on veut leur faire porter est sans doute un peu large : n’ont-ils pas finalement aussi contribué à la désescalade en diffusant des contenus qui ont profondément choqué une partie de l’opinion ?
Au-delà de ces émeutes, c’est en réalité la capacité des Etats à maintenir l’ordre public dans les “défouloirs” que sont devenus les réseaux sociaux qui est en cause. Appels à la violence, messages racistes, menaces de mort, vente de produits stupéfiants…: les contenus illicites pullulent. Seul problème : s’ils constituent de véritables places publiques, ces espaces sont juridiquement privés. D’où les réglementations qui cherchent à imposer une meilleure modération des contenus aux grandes plateformes qui les opèrent comme le Digital Service Act européen entré en vigueur le 25 août 2023. D’où également le projet de loi sur la régulation de l’espace numérique (SREN) examiné par l’Assemblée nationale et le Sénat et qui prévoit, outre le filtre anti-arnaque, le blocage des sites pornographiques accessibles aux mineurs, la création d’un délit d’outrage en ligne contre les élus, conséquence directe des récentes émeutes urbaines.
Pourtant, ces régulations sont complexes à concevoir et plus encore à mettre en œuvre. S’il faut éviter de se réfugier derrière la barricade de la liberté d’expression, des gardes-fous doivent être prévus pour éviter que ces régulations n’attentent pas aux libertés privées. Au plan pratique, comment modérer efficacement les contenus en considérant que les technologies ne sont jamais pas efficaces à 100% ? Quel délai imposer aux plateformes pour une demande de retrait ? Faut-il rendre obligatoire la fourniture de son identité lors de la création d’un compte sur les réseaux sociaux ? Demander la suppression des comptes ? Rappelons qu’au plus fort des émeutes, ce sont 550 demandes de retraits de contenus illicites qui ont été adressées en un week-end par les autorités aux opérateurs de réseaux sociaux et qu’à elle seule la plateforme de signalement de la police judiciaire Pharos a notifié 236 demandes de retrait de contenus.
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